Benoît Coquil raconte la découverte d’un couple de scientifique pour le pouvoir de champignons hallucinogènes dans le Mexique des années 50. Une aventure vers un monde invisible.
Mexique, années 1950. Au cœur des montagnes brumeuses de la région de Oaxaca, la chamane María Sabina se livre à d’étranges incantations, mêlées de transes et de chants. Elle a recours dans ses rituels aux psilocybes, de puissants champignons hallucinogènes, qu’elle appelle ses « petites choses ».
Mus par une insatiable curiosité, Gordon et Valentina Wasson, d’étonnants scientifiques autodidactes, partent depuis New York en quête du dernier psychotrope encore inconnu de l’Occident.
Un jour, au Metropolitan Museum, au fond de la grande salle déserte des arts océaniens, Gordon tombe nez à nez avec un masque de Nouvelle-Guinée qu’il dévisage – ou plutôt qui le dévisage – pendant presque une heure. À nouveau, il est hypnotisé, comme dans la gare de Minneapolis. Plutôt qu’un masque, c’est comme un heaume de chevalier – un heaume majestueux en écailles de tortue, avec au milieu un long nez pointu et deux yeux grands ouverts, très blancs, qui le clouent sur place. À son sommet, un oiseau marin en bois, genre albatros ou frégate, aux vastes ailes déployées. Un masque à métamorphose, donc, une sorte d’objet magique qui transformerait son porteur en oiseau des mers, ou lui conférerait au moins le don de voler. Est-ce à cela que pense le petit Gordon planté là ? S’imagine-t-il chausser le masque et s’envoler par la pensée au-dessus de Long Island ? A-t-il déjà l’intuition qu’il existe des voyages immobiles ? Mais ça y est, la rêverie est finie, cette fois c’est son frère qui l’attrape par le collet.
Dans son premier roman, Benoît Coquil nous embarque dans la vie d’un couple de curieux, les Wasson. On suit ces deux amoureux et passionnés avec amusement et étonnement qui évoluent dans cette Amérique des années 50. Il y a d’un côté les Etats-Unis, le monde intellectuel et financier qu’ils peuvent fréquenter. De l’autre, le monde des esprits et de la nature avec la présence d’une chamane, héritière de la culture indienne. La connexion entre ces deux mondes se fait par l’intermédiaire des champignons. L’auteur nous montre alors tout un univers insoupçonné des champignons. Cela passe par les descriptions, par la saveur et l’éventuelle menace de leur ingestion. Rapidement, arrive le pouvoir de certains spécimens, les psychotropes. L’auteur nous embarque alors dans des voyages immobiles, des rêveries qui se confrontent à une société étatsunienne qui se construit avec rigidité, se voulant temple du capitalisme.
A cela s’ajoute l’écriture très précise de l’auteur. Il suit ce parcours avec attention et le rythme de ses phrases est faite de pirouettes et de chutes. L’aventure de ce couple est assez rocambolesque et Benoît Coquil y ajoute beaucoup d’humour et d’esprit. Il parvient ainsi à digérer la documentation réunie pour décrire le succès rencontré par ces champignons hallucinogènes et cerner par les mots les effets sensibles provoqués par eux.
Benoît Coquil, Petites choses, Rivages, 19€