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« Du domaine des Murmures » de Carole Martinez, une histoire envoûtante

En 1187, le jour de son mariage, devant la noce scandalisée, la jeune Esclarmonde refuse de dire « oui » : elle veut respecter son vœu de s’offrir à Dieu, contre la décision de son père, le châtelain régnant sur le domaine des Murmures. La jeune femme est emmurée dans une cellule attenante à la chapelle du château, avec pour seule ouverture sur le monde une fenestrelle pourvue de barreaux. Mais elle ne se doute pas de ce qui est entré avec elle dans sa tombe…
Loin de gagner la solitude à laquelle elle aspirait, Esclarmonde se retrouve au carrefour des vivants et des morts. Depuis son réduit, elle soufflera sa volonté sur le fief de son père et ce souffle l’entraînera jusqu’en Terre sainte.

Quelque part en Bourgogne au XII°siècle, la jeune Esclarmonde, fille du seigneur des Murmures est aussi fraîche qu’innocente, aussi belle que le printemps et l’hirondelle. Son père veut la donner au fils d’un châtelain voisin mais la belle ne veut pas de Lothaire qui brutalise et viole les servantes, qui chasse et qui tue sans vergogne. le jour des noces, elle fait l’impensable et dit « non » à son promis.
Ce n’est pas à un homme qu’elle veut se donner mais à Dieu et c’est ainsi que (contre l’avis de son père mais avec le soutien du prêtre), elle fait bâtir contre la chapelle du Domaine des Murmures un reclusoir dans lequel elle s’emmurera à jamais. Esclarmonde sera une recluse… Elle sera une mère aussi et cet enfant, fruit de sa dernière heure de liberté et de printemps la sauvera et, d’une certaine manière, la perdra.
Du fond de son reclusoir, Esclamonde écoutera, conseillera, voyagera aussi. Elle sera aimée, vénérée. Elle sera humble et parfois pleine d’orgueil. Elle sera déchirée aussi, tiraillée entre sa foi et des bouffées de vie et de désir.
Il y aura la Croisade, il y aura une fée verte qu’on croirait jailli des eaux. Il y aura des hommes et des femmes. Il y aura des flammes. Il y aura du sang, des larmes. Il y aura de la beauté et de la violence. La cruauté des hommes et de la foi.

« Le monde en mon temps était poreux, pénétrable au merveilleux. Vous avez coupé les voies, réduit les fables à rien, niant ce qui vous échappait, oubliant la force des vieux récits. Vous avez étouffé la magie, le spirituel et la contemplation dans le vacarme de vos villes, et rares sont ceux qui, prenant le temps de tendre l’oreille, peuvent encore entendre le murmure des temps anciens ou le bruit du vent dans les branches. Mais n’imaginez pas que ce massacre des contes a chassé la peur ! Non, vous tremblez toujours sans même savoir pourquoi. »

L’histoire est envoûtante, étrange, fascinante. L’écriture est ensorcelante, d’une beauté-fée, belle et cruelle, riche et suspendue.
Alors, fermez les yeux : écoutez l’histoire qui perce à travers le chant des pierres et la voix de l’emmurée qui n’avait pas voulu se marier. Allez-y.


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celine

Passionnée de littérature depuis toujours, j'ai la particularité de lire de tout et tout le temps.

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