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« Le premier siècle après Béatrice » d’Amin Maalouf, un livre sur la féminité du monde


Que peut-il arriver lorsque des sortilèges millénaires se conjuguent à une science moderne aussi performante que dépourvue d’éthique ?
Au départ, il y avait de mystérieuses fèves, réputées favoriser les naissances des garçons, trouvées par le narrateur sur un marché égyptien. Puis ce fut la raréfaction des naissances féminines. Commença alors l’épopée d’un homme passionnément attaché à la « féminité du monde »…

Ce qui n’était, séculairement ,que charlatismes et superstitions archaïques, sans effet réel devient un problème politique, à l’échelle mondiale, lorsque des chercheurs sans scrupules parviennent à fabriquer, puis à écouler massivement sous le manteau, un produit chimique efficace qui fait chuter dramatiquement le nombre des naissances des filles.
A travers une enquête à rebondissements qui entraine les protagonistes jusqu’à l’équateur, le savant et sa compagne journaliste cherchent une explication, découvrant alors le partage de notre planète entre un Sud qui dépérit et un Nord qui s’exaspère.

« Je ne sais si beaucoup d’hommes me ressemblent en cela, mais j’ai toujours désiré, même adolescent, porter dans mes bras une fille qui soit de ma chair. J’ai toujours estimé que cela me procurerait une sorte de plénitude sans laquelle mon existence de mâle demeurerait inaccomplie. J’ai constamment rêvé de cette fille, dont j’imaginais les traits et la voix, et que j’avais prénommée Béatrice. Pourquoi Béatrice ? Il doit bien y avoir une raison, mais aussi loin que je remonte dans ma mémoire, je ne découvre en moi aucune racine à ce nom, simplement il est là, comme une fougère éclatée.
Quand pour la première fois, je l’avais prononcé devant Clémence, elle s’était dite jalouse, en riant fort pour me faire croire qu’elle plaisantait. Mais elle riait mal. Elle venait de comprendre que jamais je ne pourrais continuer à l’aimer si elle me faisait renoncer à ce rêve. Et qu’elle devait se résigner à cohabiter pour toujours avec Béatrice, bien plus intimement qu’avec ma collection de coléoptères.
Désormais, pour moi, les deux femmes allaient faire l’objet d’un même culte amoureux. J’avais résolu, dès que Clarence prendrait l’année promise, d’obtenir moi-même une année sabbatique de paternité. Bien avant d’en connaître la date, je l’avais baptisée -L’année Béatrice-« 

Amin Maalouf, sur la question centrale du livre, apparaît, comme dans ses autres œuvres, tel un visionnaire, extrêmement lucide, qui analyse avec une précision scientifique les conséquences des comportements de l’Homme sur le présent et le futur de sa propre espèce.
Passant du roman historique au roman futuriste, l’auteur, avec une maitrise parfaite de l’écriture, un style fluide, agréable et accessible, nous transmet un roman qui donne à réflexion.
Et on en redemande !

Avez vous lu ce roman ?


Paru chez Livre de Poche, 157 pages, 7,20 euros

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celine

Passionnée de littérature depuis toujours, j'ai la particularité de lire de tout et tout le temps.

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