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Jean-Pierre Bacri, le plus grand des Batman

Beaucoup d’acteurs ont porté la cape, le costume noir et marché dans l’ombre, mais l’un d’entre eux vient de nous quitter et de tous c’était peut-être le plus grand, et entre autres pour avoir supporté toute sa carrière qu’on lui rabâche qu’il était un râleur.

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Batman et Robin. Véridique.

Jean-Pierre Bacri naît en 1951, 12 ans après le chevalier noir qui apparaît lui en 39 dans un coin de comics. Quand ce dernier était encore en train de sautiller dans une série génialement kitsch, avec Adam West dans ses collants moulants, le premier est découvert par le grand public 6 ans après ses débuts au cinéma, dans un film souterrain de Luc Besson, Subway, en 1985.

Synopsis : Après avoir dérobé des documents compromettants, un homme se réfugié dans l’univers fascinant et agité du métro parisien. Une impitoyable chasse à l’homme s’organise au cours de laquelle d’étranges liens se tissent entre le cambrioleur et sa victime.

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Batman, clairement le plus charismatique de la Justice League

Là, se dévoile l’allure nerveuse et gauche de l’inspecteur « Bateuman », avé l’accent de Michel Galabru, son commissaire et supérieur, qui l ‘envoie partout dans les couloirs chasser un faux blond : Christophe Lambert. De ce film pop où on court partout _ et souvent _ pour le simple plaisir de tourner des scènes d’action en quelques scènes cultes, la loose (oui, la loose, nous sommes en 1985) d’un homme prend forme, magnifique, et elle y devient légendaire. Jean-Pierre Bacri en Batman, c’est un homme visiblement las de devoir traîner ses guêtres dans le métro, quand il rêvait d’enquêtes plus prestigieuses à l’américaine un étage ou deux au-dessus. Il est là malgré tout, hâbleur, pro, mais fait avec. Tant mieux, c’est dans l’adversité que les héros naissent.

Blond. James blond.

Batman dans le métro, c’est un mec qui chasse aussi les pickpockets en patins à roulettes, joue du talkie-walkie, un vieux chewing-gum dans le bec, le tout dans des costards un poil trop grands pour lui. Deux fois il chasse Christophe Lambert, en insaisissable héros hollywoodien, il ne se ménage pas et pourtant il perd, n’attrape rien, se fait même manipuler, le pauvre, par une Isabelle Adjani au sommet du star-system, dans une scène devenue culte :

« Bonsoir, vous attendez le commissaire, je suppose ? Je ne sais pas s’il va repasser ce soir… Eh bien vous pouvez tout me dire, je suis quasiment son bras droit…

_Vous connaissez Quimper ?

_Quimper oui

_Et St Raphaël

_St Raphaël, oui oui, je connais de nom, c’est sur la côte d’Azur

_J’ai perdu mon passeport en faisant le trajet

_Ah bon ? Vous avez perdu votre passeport entre Quimper et St Raphaël ?

_Exactement… Je sais : c’est pas votre périmètre, mais le commissaire m’a dit tellement bien de vos services

_Ah bon, mais… Ah, ça va pas être facile, ça, ça va pas être facile, qu’est-ce que vous aviez comme voiture ? »

Le coiffeur d’Isabelle Adjani a raté son stage sur le tournage

Jean-Pierre Bacri, c’est ce Batman-là, c’est le nôtre, celui qui donne corps au personnage qui a la joie et surtout le courage de ne pas être le gagnant tout le temps. Voilà un de ses plus beaux rôles, celui qui a aussi été endossé un temps par exemple par Raymond Poulidor en icône qu’on a voulu vaincue à tout prix, en oubliant qu’il a gagné le tour d’Espagne en 64, et celui qui nous pousse à souhaiter pendant tout Subway que l’inspecteur Bateuman n’attrape jamais, oh non jamais celui qu’il pourchasse. Qu’il crie « Merde, merde, chier !» dans le métro après un ultime échec, c’est aussi ce que beaucoup se sont pris à aimer en apprenant sa disparition il y a quelques jours. Quelques scènes plus tard, le commissaire débonnaire lui ramène sa proie, qu’il a cueillie comme une fleur en boulottant son sandwich, et on a de la peine pour lui. Bateuman explose alors, triste et colérique, d’une peine dont on ose à peine sourire. Après tout, c’est bien mieux comme ça : il est ainsi plus facile de porter une cape qu’un costard, la barbe mal taillée, les joues basses, l’air mal réveillé.

Au cinéma en 1985, les patins à roulettes sont des trucs de gros méchants

Jean-Pierre Bacri a souri, a gueulé, il a fait tout ce qui est la vie de tous les jours dans le cinéma français, celle qu’on reconnaît avec tendresse à l’écran. Dans le métro, sur des plages, en patron, en flic, en ce que vous voulez. Loin de tout cela, Batman est le super héros préféré des fans, parce qu’il n’a pas de pouvoirs, pas de vices: il fait avec, lui aussi. (ok, avec un gros livret A) Chez nous un de ses interprètes s’en est allé, un peu improbable, pas le plus connu, mais cela lui allait certainement bien. Ne vous embêtez pas trop pour les hommages, ne pleurez pas trop longtemps, ce serait un coup à le faire râler.

Quoi ? Non, je ne l’ai pas dit…

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