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Immortaliser la prison d’Orléans, dans un livre de photographies

Un travail commun photographique, un souvenir du vestige abandonné de la prison d’Orléans avant sa démolition, a été finalisé pendant le confinement. A l’initiative du projet, un collectif de photographes orléanais désireux de laisser une trace de cet endroit. Le livre de 100 pages, est disponible en précommande jusqu’à vendredi.

Détruite en 2019, la prison d’Orléans évoque à tous les orléanais quelque chose de spécial. Pour certains, se sera l’Histoire par son architecture caractéristique du 19ème siècle. Pour d’autres, la prison évoque un endroit abstrait, une maison de l’interdit, décrite aux enfants comme la punition ultime. Lieu à cacher, de l’ordre de l’imaginaire pour beaucoup. Implantée dans un endroit peu urbanisé en 1896, l’évolution de la ville avait placé la maison d’arrêt au coeur de la vie des Orléanais au fil des décennies. Lieu redouté et fascinant, il est aussi, surtout, une histoire d’Hommes. Pour ses anciens voisins, il en restera les bruits, les plaintes parfois glaçantes, qui s’élevaient des fenêtres. La maison d’arrêt abritait des destins brisés, des histoires de vies écorchées vives. La prison ? Un lieu pour les vies que l’on cherche à éteindre.

Immortaliser la prison d'Orléans, dans un livre de photographies 2

Quelques semaines avant le début de la démolition, la ville a proposé des visites au public. Les curieux ont pu découvrir ce lieu fermé et quelques photographes sont venus immortaliser l’endroit. Laisser une trace de ce lieu où de nombreux parcours se sont mêlés, parfois même agglutinés ensemble. 242 personnes avaient été recensées lors des dernières inspections, pour 105 places d’accueil théorique. Prison la plus surpeuplée de France, les détenus seront déplacés ensuite à la prison de Saran en 2014.

Un collectif de photographes orléanais a décidé de regrouper son travail et de laisser une marque de cet endroit, de ces histoires, dans un livre photos. Nous nous sommes intéressés à la genèse du projet, son élaboration et à ce que ce tête à tête photographique a pu susciter chez eux.

Le Projet

A l’origine du projet, 10 photographes qui se connaissent par hasard ou par affinité, aux parcours différents mais à la même passion : la photographie. Certain(e)s on fait des études d’arts, d’autres sont plus autodidactes, certain(e)s en vivent, d’autres non. A L’ arrivée ? Un collectif éphémère hétérogène, riche de sa diversité (parcours, technicité, sensibilité… ) réunis autour d’une envie, la curiosité de voir ce qui se dresse derrière les hauts murs de cette prison. Dans le travail distinct de chacun, on en ressort tout de même un de fil rouge : une affinité pour les traces laissées par l’humain, et l’exploration urbaine photographique ( abrégé URBEX ).

Via des timings différents, ils sont arrivés à shooter la prison. Officiellement au début, lors des visites avant démolition en décembre 2018, restreintes à 30 minutes, puis plus posément en off, par bouche à oreille. « C’était frustrant ce temps limité. L’un d’entre nous a pu récupérer les clefs avant le grand début du chantier de démolition, il en a prévenu 2-3, nous aussi. On s’est donc retrouvé un dimanche de décembre en début d’aprèm et là on a pu explorer et prendre des photos jusqu’à la nuit » raconte Julien Weiss, un des photographes. Une fois dedans, libre expression à chacun, libre interprétation de ce qu’ils voyaient. Chacun a utilisé ce qu’il souhaitait (boitiers, trépieds, simple smartphone … ) l’essentiel étant ailleurs, dans la vision, la sensibilité de chacun.
 
Rapidement après cette séance photo, est née l’envie de créer un livre, impulsée par 3 d’entre eux. « Le projet est spontanément né après la visite. L’envie d’immortaliser sur le papier, et de créer un objet. Le temps s’est écoulé entre les photos et la naissance de cet ouvrage… Mais il est là, dévoilé à tous » raconte Jordan Poudroux, du trio à l’origine du projet. « Une photo elle prend une autre vie quand elle est couché sur du papier. Par contre ça a pris plus de temps de prévu de faire l’édition, entre les contraintes de sélection, la maquette, les décision collectives, le choix des photos. Au début on voulait le sortir pour décembre 2019, mais le projet arrive pour décembre 2020. Et c’est un truc cool finalement dans cette année un peu étrange ! » souligne Julien. Le partage aussi est très présent, vouloir montrer à ceux qui n’ont pas vu.

Entre souvenirs et curiosité

Pour certains d’entre eux, ce lieu les lie à des souvenirs « j’ai été pion à l’internat du lycée Franklin, le souvenir spécial que j’en garde ce sont les nuits de juin quand il faisaient chaud, que toutes les fenêtres de l’internat étaient ouvertes on qu’on entendait le concert des sifflets. Cette méthode si particulière de communication entre les prisonniers et leur proches à l’extérieur » nous dit Julien, « le haut mur d’enceinte, très long quand tu passes sur le boulevard, m’a marqué gamin » complète Enzo De Kolor. Pour d’autres, l’attrait du lieu réside purement dans la passion pour l’architecture ou dans l’urbex.

Le travail photographique

Le mot d’ordre était clair : de la liberté ! Pas de consignes hormis celle de ne pas faire figurer l’humain sur les photos. Chaque photographe était libre de montrer ce qu’il voulait, de s’exprimer librement ; ce qui donne donc au final des lectures très différentes de l’endroit. De la richesse !
Visiter un tel lieu ne laisse pas de marbre, et c’est d’ailleurs souvent ce qui est recherché dans le shoot de lieux abandonnés : le contraste saisissant entre des traces de l’humain, un présent gravés sur la pierre, que l’on perçoit encore et le lieu laissé à l’abandon, rattrapé par l’usure du temps et la nature. « C’était étrange d’être libre dans ce lieu de privation, des mots des textes écrits sur les murs, les cuisines avec les armoires à couteaux sous haute sécurité, Le sentiment le plus étrange fut pour la cour du quartier femme où il y a des jeux pour enfants juste à coté des cours d’isolement. En fait en visitant on se dit que c’est un monde juste à coté du nôtre, et que les conditions de vies y sont bien pourries » nous livre Julien.

« Le plus surprenant reste la sensation de lieu occupé, mais vide. 
Mort, mais vivant
« 

Jordan Poudroux


Ces visites photographiques ont alimentées aussi des discussions sur la représentation de la prison, les idées reçues du milieu carcéral et les débats soulevés autour des conditions de détention « Quand vous voyez la taille des cellules qui sont conçues pour deux, c’est déjà pas grand mais il faut imaginer qu’ils ont pu être jusqu’à 5 dedans, l’horreur. La surpopulation carcérale c’est un vrai problème de société…a t’on vraiment besoin d’enfermer tout ces gens, je m’interroge vraiment » , Julien.

Le livre

Le financement du livre a été possible grâce à la participation à part égale de chaque photographe, accompagné des précommandes. Processus indispensable, elles permettront de tirer le nombre exact de livres, aucun second tirage ne sera prévu par la suite. Le prix est de 15€ hors frais de port, vous aurez environ 100 pages à découvrir en format carré 21cm par 21 cm.
Vous pouvez précommander le livre jusqu’au vendredi 4 décembre.


Pour précommander :
1- Envoyer leur vos coordonnées de livraison par email ou sur leur page fb
2- Cliquez sur le lien

Plus d’infos : 1896-2019 – Prison d’Orléans
Mail de contact : 1896.2019.prison@gmail.com

Liste des photographes :
Arnaud BOUTON, Céline BERNARDO, Jordan POUDROUX, Julien WEISS, Enzo DE KOLOR, Manuela BOURBOULON, Mitch TAILLANDIER, PIerre RUPRECHT, Thierry BLANCHARD, VIncent PASQUIER 

L’après

Rachetée par la mairie d’Orléans en novembre 2018, la démolition du l’ancienne maison d’arrêt a suivi au premier semestre 2019. Un centre aqualudique « L’O » verra le jour en mai 2021.

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Aurélie

Expatriée Orléanaise engagée dans la promotion du dynamisme culturel , sportif and co de cette chère ville ... Car quelques fois il suffit d'ouvrir un peu ses oreilles et ses yeux pour faire des infidélités agréables à son canapé :) - Accessoirement kiné débordée et débordante , addict -

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