Dans son premier roman, Adèle Fugère nous raconte comment la petite Rosalie Pierredoux, 8 ans, s’empare des mots, de l’esprit et de l’élégance du grand acteur, Jean Rochefort. Un livre drôle plein de fantaisie.
Rosalie Pierredoux, 8 ans, vit en Bretagne avec ses parents. Certains diraient que c’est une petite fille joyeuse qui aime amuser les autres et vit plutôt bien entouré d’animaux chez elle et de son meilleur ami Simon. Parfois, Rosalie se sent moins bien, envahie par une certaine fatigue du monde. Un matin, elle a une moustache et s’appelle Jean Rochefort.
Mais au moment de m’habiller, j’ai dit à maman :
« Maman, il me faut des habits ! De nouveaux habits !
– Mais les tiens ne conviennent pas ?
– Ce ne sont pas les miens. Ce sont ceux de Rosalie. »
J’ai trouvé une chemise blanche à col Claudine, assez chic. C’était du lin. Des bretelles vertes. Un pantalon en velours côtelé très « gentleman-farmer » mais pratique. Et jaune. Un pull-over aubergine et des chaussettes couleur rouille. Sans oublier des prothèses festives. Une imitation de guêtres bicolores noir et blanc. Je les avais choisies amusantes tant qu’à faire. Il y a quand même une coquetterie chez moi. Le confort oui, mais le laisser-aller jamais. Voilà. J’avais l’air de ce que j’étais.
Adèle Fugère nous plonge, avec beaucoup de rapidité, dans l’univers de l’enfance, de doute face au monde, de mélancolie de la maturité et dans un hommage à Jean Rochefort. Comme le titre l’indique, ce livre est l’histoire d’une fillette de 8 ans qui prend les mots et les manières du grand acteur français. Par ses mots, on entend la voix de Jean Rochefort. Au-delà des clins d’œil, c’est toute une vision du monde qui est délivrée. Pour se protéger d’une certaine tristesse, Rosalie se réfugie dans la philosophie tendre et piquante (les répliques fusent et font mouche) du comédien. La fantaisie des deux se rencontre et c’est une belle tendresse qui naît.
Adèle Fugère croque les scènes et les personnages avec efficacité et vigueur. Chaque scène prend vie. Par cet exercice, l’autrice défend la possibilité de faire le funambule dans la réalité et la puissance des mots. Ceux de Rochefort ne dissimulent pas l’avis de Rosalie. Elle se sent bien avec et après les avoir prononcés, aura peut-être mieux compris la vie. Le surréalisme de la situation de départ est bien ancré dans la réalité et permet à l’autrice de pointer les injonctions faites à toute personne, même aux petites filles. Ainsi, une fois qu’elle prend le nom de Jean Rochefort, son meilleur ami demande à Rosalie si elle est une fille ou un garçon. Elle lui répond : Pastel.
J’ai 8 ans et je m’appelle Jean Rochefort, Adèle Fugère, Buchet Chastel, 13,50€