cultureLectureCulture

Les mots nus, un premier roman fiévreux

Dans ce premier roman, Rouda, un des pionniers du slam français, raconte le parcours d’un jeune homme bien décidé à ne pas se laisser abattre par la société. Son arme ? les mots.

Entre Belleville et la Brousse, Ben cherche sa place. Il traverse les années 90 entre amour pour toujours et divers trafics. Il regarde son pays changer, les modes se succéder et voit surtout comment dérive une société. Que peut-il faire lui avec, comme seul bagage, les mots ?

Mitterrand est déjà mort depuis un moment, c’est l’époque de Steffi Graf, des numéros de téléphone à dix chiffres, de la vache folle et des talibans sur Kaboul. Avec Oriane, nous vivons un amour inévitable. Elle bosse de nuit, en stage à l’hôpital Bichat. J’en profite pour réorganiser mon cerveau. Je tente d’organiser ma vie. Faut que je sois à la hauteur. Que j’abandonne ma part d’enfance. Que je parle comme un adulte. J’ai lâché tous mes boulots d’étudiant et j’ai investi quelques billets dans le petit commerce de mon pote serbe. J’ai mis pas mal d’argent de côté. C’est à partir de cette année-là que j’ai commencé à élaborer ma théorie de la lutte des crasses.

Le roman de Rouda plante vite le décor et l’époque. La France de 1990 à 2007. A la manière d’un journal, année après année, mois après mois, ce personnage sortir de l’enfance et atteindre l’âge adulte. Par quelques touches, observation vive de l’auteur, Rouda montre le quotidien de son protagoniste et de ses proches sur près de 20 ans. Le temps file au rythme de phrases percutantes. Se suivent les changements qui bousculent la société française. Des rapports entre parents et enfants aux choix politiques, tout est passé en revue.

Au milieu de tout cela, Ben est un peu perdu. Il ne prend pas position, ne dit rien, retient les mots et tombe parfois dans la violence. Ben cherche à trouver la meilleure place pour voir cette société, son pays et le raconter. Par cette histoire, Rouda rappelle toute la puissance du vocabulaire et l’importance de l’expression. Dans ce livre, parler, c’est s’engager dans la société, y prendre part. Rouda construit un roman où un personnage né aux marges de la société décide de ne pas se laisser exclure. Pour cela, il faut qu’il parle. Il faut qu’il donne de la voix.


Rouda, Les mots nus, Liana Levi, 17€

Afficher plus

Julien Leclerc

Insatiable curieux avec un blog littéraire Le Tourneur de pages (c'est le premier lien ci-dessous)

Articles similaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Bouton retour en haut de la page